SMF

La position de la SMF sur le plan S

La SMF se positionne sur le plan S. Ce dernier pourrait influencer fortement les comportements et mettre en danger certains modèles de maison d'édition.

Le conseil d'administration de la SMF a adopté la motion suivante :

 

La SMF s'associe à l'EMS pour dénoncer le fait que, pour piloter le suivi du plan pour la Science Ouverte, la Commission Européenne ait choisi comme sous-traitant l'éditeur Elsevier, créant ainsi une situation de grave conflit d'intérêt :
http://euro-math-soc.eu/news/18/10/1/ems-new-developments-concerning-open-access


Ce conflit d'intérêt est aggravé par l'emprise excessivement importante que cet éditeur exerce par cette entreprise dans certains secteurs de l'édition scientifique. Ainsi on conçoit mal comment Elsevier pourrait se faire l'écho des difficultés des plus petites maisons d'édition, plus fragiles et en concurrence avec elle.


Le plan S contient certaines propositions allant dans le bon sens : renforcer les  droits d'auteur et de copyright des chercheurs, promouvoir l'accès ouvert aux publications scientifiques avec une politique de contrôle des coûts pour les institutions de recherche, bannir le système de publication en Accès Libre "hybride" et rappeler l'utilité des archives ouvertes. 

Cependant ce plan suscite en même temps les plus grandes inquiétudes pour les raisons suivantes : 

  • il ne prend pas en compte l'extraordinaire complexité et la très grande diversité du système de publication actuel, suivant les disciplines, la taille et les moyens des maisons d'édition et le fait que certaines de ces maisons d'édition sont à but non lucratif, tandis que d'autres ont des objectifs purement commerciaux ;
  • ce plan est implicitement centré sur le modèle de publication dans lequel l'auteur ou son institution paye les frais de publications. Un tel modèle présente de multiples défauts, dont le premier est de remplacer les inégalités pour lire les articles scientifiques par des inégalités pour les publier. Certes le plan S n'exclut pas explicitement la " voie verte ", c'est à dire l'usage des archives ouvertes pour le dépôt de documents avec les mêmes contenus que les articles publiés, mais il ne la prévoit pas explicitement, alors qu'à court terme, cette voie constitue le principal  moyen d'éviter de payer des frais de publication pour publier en accès ouvert ;
  • les critères de compatibilité (" compliance ") ne sont pas énoncés et restent donc dans le flou  et l'objectif de plafonner les frais de publication est tout aussi flou, alors que la mise en œuvre d'une  telle mesure est une tâche extrêmement complexe qui, si elle est réalisée sans précautions, risque  de niveler par le haut les prix des APC et d'aboutir ainsi à un remède pire que le mal ;
  • de plus, bien d'autres modèles se  développent, avec la promesse d'offrir à moyen terme des améliorations en terme d'accessibilité, de rapidité de diffusion et de qualité d'évaluation scientifique, à des coûts moindres que ceux  payés actuellement et le plan S devrait explicitement encourager toute politique en faveur de ces modèles innovants (suivant en cela les orientations prônées par l'Appel de Jussieu) ;
  • à ce sujet, le rôle attribué aux archives ouvertes dans la formulation actuelle du plan S semble quelque peu sous-estimé. Or les archives ouvertes, sous le contrôle d'institutions publiques, indépendantes d'intérêts privés, devraient être placées au centre  du dispositif de diffusion et d'archivage électronique de l'information scientifique, sur lequel  les communautés scientifiques pourront s'appuyer pour construire des systèmes d'évaluation  et de validation scientifique ;
  • rappelons que la diversité des modes de publication est la seule  façon de répondre à la liberté des chercheurs de publier comme ils veulent ;
  • le délai extrêmement court envisagé pour la transition n'est pas raisonnable pour la plupart des  petites maisons d'édition et, en particulier, pour une société savante comme la SMF. 

 

Ainsi, la SMF encourage les agences signataires du Plan S à prendre en compte ces difficultés, à ne pas se précipiter dans sa mise en œuvre et à prendre en compte la complexité de la tâche. 

Publiée le 03.12.2018