Lettre au Ministre Claude Allègre
Monsieur le Ministre,
Par la note du 12-05-98 parue au B.O.E.N. du 21-05-98, complétée par l'arrêté du 15 juin 1998 paru au J.O. du 18 juin 1998, l'organisation de l'agrégation externe de mathématiques change brutalement dès la session 1999 : l'épreuve écrite d'option de mathématiques appliquées est remplacée par une épreuve orale de modélisation.
Les connaissances et les compétences requises par le monde d'aujourd'hui sont en rapide évolution. A cet égard, il est tout à fait normal et souhaitable que les épreuves d'un concours destiné à recruter des enseignants pour demain évoluent elles aussi. L'évolution du concours d'agrégation doit prendre en compte ces changements.
Il paraît néanmoins nécessaire de souligner que la réforme est soudainement imposée en fin d'année universitaire, avec une concertation préalable très insuffisante, sans délai de réflexion. Elle ne laisse pas aux collègues responsables des préparations à l'agrégation le temps nécessaire pour organiser la préparation au concours rénové de 1999. Elle ne permet même pas de réorganiser les enseignements des licences et maîtrises de mathématiques afin de préparer les étudiants convenablement pour les concours de 2000 et 2001.
Pour ce qui concerne la suppression de l'épreuve d'option à l'écrit, la précipitation est d'autant plus surprenante qu'avaient été publiés au BO quelques semaines auparavant des programmes rénovés portant précisément sur les épreuves d'écrit supprimées dans le BO du 21-5-98. Les candidats et les préparateurs du concours pour l'année prochaine peuvent légitimement se sentir très inquiets.
Du point de vue de la cohérence scientifique du concours, une partie des connaissances fondamentales qui étaient au programme de l'option à l'écrit disparaissent, sans qu'elles apparaissent au programme de la nouvelle épreuve d'oral. Vu l'importance des programmes de l'agrégation sur l'organisation des seconds cycles, cette évolution pourrait avoir une incidence négative sur l'ouverture scientifique des étudiants en mathématiques, ce qui serait pour le moins paradoxal.
La forme et le contenu de l'épreuve de modélisation semblent à l'heure actuelle manquer d'une définition nette, ce qui risque de plonger préparateurs et candidats dans la perplexité. Ils gagneraient sans aucun doute à bénéficier d'une réflexion plus approfondie. Il convient également de noter que cette épreuve va poser de nombreux problèmes pratiques de mise en place, notamment au niveau informatique.
Représentant la SMAI, la SMF et la SPECIF, nous demandons instamment un aménagement de cette réforme et un réexamen de certaines de ses dispositions, notamment un complément de réflexion pour la mise en place de l'épreuve orale de modélisation. Nous regrettons vivement le défaut dans la concertation (à laquelle nos Sociétés sont évidemment prêtes à participer) qui a conduit à la situation actuelle. Nous pensons que de toute façon, un délai de deux ans est nécessaire pour la mise en ¦uvre de telles modifications majeures de l'agrégation afin de permettre une adaptation des programmes de licences et maîtrises, et ceci dans un souci d'équité vis-à-vis des candidats.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de notre très haute considération.
Alain Damlamian, Président de la SMAI
Mireille Martin-Deschamps, Présidente de la SMF
Max Dauchet, Président de la SPECIF
Copies à : Ségolène Royale, Vincent Courtillot, Didier Dacunha-Castelle, Madame Moreau, Pierre-Louis Curien, Didier Robert.