Décès de Gérard Laumon
La Société Mathématique de France présente ses plus sincères condoléances à sa famille et à ses proches.
<< C'est avec une très grande tristesse que nous avons appris le décès, samedi 4 octobre au matin, à l'âge de 73 ans, de notre collègue Gérard Laumon, des suites d'un cancer contre lequel il a lutté pendant un an avec un immense courage. C'est une figure majeure de la géométrie arithmétique et de la théorie des représentations qui nous quitte.
Né à Lyon en 1952, élève de l'Éns Ulm de 1972 à 1976, agrégé en 1975, il prépare, sous la direction de Luc Illusie, une thèse d'État, qu'il soutiendra à Orsay en 1983. Elle contient entre autres la solution de questions difficiles posées par Deligne en 1976 sur la théorie de la ramification. Mais ce sont ses travaux ultérieurs qui le rendront célèbre. En 1984, il construit un analogue $\ell$-adique de la méthode de la phase stationnaire de Witten et à l'aide de celle-ci, il résout la conjecture de Deligne sur la formule du produit pour les constantes des équations fonctionnelles des fonctions $L$. Gérard Laumon se tourne alors vers la théorie des formes automorphes. Il va animer dans ce domaine toute une école, qui réalisera des avancées décisives. Il est notamment à l'origine de la théorie de la correspondance de Langlands géométrique, un monstrueux programme, qui n'a été achevé que tout récemment par Dennis Gaitsgory et ses collaborateurs. Son élève Laurent Lafforgue reçoit la médaille Fields en 2002 pour sa construction de la correspondance de Langlands pour $\mathrm{GL}_n$ sur les corps de fonctions, et son élève Ngô Bao Châu la reçoit en 2010 pour la démonstration du lemme fondamental de Langlands-Shelstad.
C'est dans l'équipe d'arithmétique et géométrie algébrique au sein du laboratoire de mathématiques de l'université Paris-Sud (aujourd'hui Paris-Saclay), que Gérard Laumon a fait toute sa carrière. Recruté comme assistant en 1976, il rejoint le CNRS en 1985, comme chargé, puis directeur de recherche, émérite depuis 2018. Il a joué un rôle essentiel dans l'activité et les évolutions scientifiques du département, par les responsabilités qu'il y a exercées, sa direction de recherche exceptionnelle, l'attention constante qu'il portait à la carrière de ses jeunes collègues, et le rayonnement international de l'école qu'il a formée. Les responsabilités éditoriales qu'il a assumées dans de grandes revues et sa participation à plusieurs comités nationaux et internationaux prestigieux ont étendu son influence bien au-delà.
Gérard Laumon avait reçu de nombreuses distinctions : médaille d'argent du CNRS (1980), prix Ernest Dechelle de l'Académie des Sciences (1992), Clay Research Award (avec Ngô Bao Châu) (2004), conférencier invité aux congrès internationaux de Kyoto (1994) et Madrid (2006). Il était membre de l'Académie des Sciences (2005), de l'AMS (2012), de l' Academia Europaea (2013). Il était chevalier de la Légion d'honneur (2010). >>
Luc Illusie a rédigé le texte ci-dessus.
Il remercie Emmanuel Letellier pour sa relecture et ses remarques.
Bibliographie sélective
Un entretien avec Gérard Laumon, propos recueillis par E. Letellier et O. Schiffmann, Gazette de la Société Mathématique de France 179/180, 2024.
De la géometrie algébrique aux formes automorphes (I) - (Une collection d'articles en l'honneur du soixantième anniversaire de Gérard Laumon), J.-B. BOST, P. BOYER, A. GENESTIER, L. LAFFORGUE, S. LYSENKO, S. MOREL, B. C. NGO, éd., Astérisque 370, 2015.
De la géometrie algébrique aux formes automorphes (II) - (Une collection d'articles en l'honneur du soixantième anniversaire de Gérard Laumon), J.-B. BOST, P. BOYER, A. GENESTIER, L. LAFFORGUE, S. LYSENKO, S. MOREL, B. C. NGO, éd., Astérisque 370, 2015.
Fonctions zêtas des variétés de Siegel de dimension trois, G. LAUMON, Astérisque 302, 2005.