Reprise des cours en présentiel
Appel de la SMF
Lors de son allocution du 24 novembre, le Président de la République a annoncé que les universités ne reprendraient pas leur cours en présence de tous les étudiants avant le 5 février, soit au mieux deux semaines après la fin de la réouverture de tous les autres secteurs de la société.
Nous, sociétés savantes, associations d’enseignants, enseignants-chercheurs des universités et de l’enseignement supérieur, nous interrogeons sur la cohérence de l’ensemble des mesures annoncées.
Nous comprenons et acceptons la nécessité de faire des efforts collectifs pour lutter contre la propagation de l’épidémie. Nous n’avons compté ni nos heures ni notre énergie pour mettre en place une organisation très contrainte dès le mois d’octobre. Avant cela, dès la rentrée, pour permettre l’accueil et le suivi pédagogique des étudiants, nous avons appliqué des consignes sanitaires parfois plus strictes que ce qui est actuellement préconisé dans les lycées. Ignorant cet effort, le décret du 29 octobre a imposé l’intégralité des cours à distance à tous les établissements d’enseignement supérieur.
Les enseignants se sont réadaptés pour compenser au mieux la perte de lien avec les étudiants pendant le mois de novembre. Mais l’annonce du 24 novembre est consternante.
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Quelle image donne notre société de l’importance des études universitaires ?
Que penser d’être maintenu éloigné de son lieu de construction sociale et de formation, alors que tous les autres secteurs, économiques, cultuels, culturels et de loisir reprennent ? Vaut-il mieux aller au bar ou en soirée plutôt qu’en cours ?
Quel sentiment se crée de voir les étudiants des lycées continuant leur formation pour beaucoup entièrement en présentiel, d’autres à mi-temps, tandis que tous les autres doivent rester presque exclusivement à distance, isolés devant leur écran, sans contact, sans accompagnement ? Ceux-là même souvent plus précaires, plus fragiles, moins favorisés socialement ? Que devient l’égalité des chances d’accès aux mêmes formations pour l’année prochaine ?
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Quelle considération montre-t-on envers les étudiants ?
Comment lutter contre une grande détresse psychologique lorsqu’on est privés de liens sociaux sur son lieu de formation, et que l’avenir, qui réside dans l’espoir d’une réussite universitaire, semble s’écrouler?
Comment construire un lien pédagogique avec un début de cours à distance au second semestre entre des étudiants et des enseignants qui ne se sont jamais vus ?
Quelle qualité espère-t-on d’un diplôme préparé à distance pendant les trois mois qui constituent le cœur de l’année universitaire, dans des conditions pédagogiques et psychologiques dégradées, quelle valeur lui reconnaitra-t-on sur le marché du travail comparativement aux diplômes équivalents obtenus dans des conditions de suivi pédagogique plus normales ?
Nous demandons, au nom de l’égalité de traitement de tous les étudiants, les mêmes conditions de reprise des cours pour tous les étudiants des premières années de licence, dans les lycées comme dans tous les établissements d’enseignement supérieur.
Nous demandons, par respect envers ceux qui constituent l’avenir de notre pays, et pour ne pas les accabler davantage, la reprise des cours dès le début du mois de janvier pour tous les étudiants et sous les mêmes contraintes sanitaires que tous les autres secteurs comparables.
Signataires :
Association des Sociologues de l'Enseignement Supérieur
Association des Enseignants Chercheurs en Psychologie des Universités
Société des Historiens Médiévistes de l’Enseignement Supérieur Public
Société Française de Biologie du Développement
Société Française de Statistiques
Société Mathématique de France